C’est ce que nous affirmons dans le Credo ! Mais récemment, plusieurs personnes m’ont demandé si ce n’était pas une manière symbolique de parler : “Je crois à la vie éternelle mais pas avec la chair, enfin, ce n’est pas possible, elle s’est décomposée en terre…” Il faut admettre que cette profession de foi dépasse notre imagination ! Et que le vocabulaire biblique ne nous facilite pas la tâche car la chair y a souvent une connotation péjorative : la chair s’oppose à l’Esprit, dit saint Paul, il faut quitter ce qui est charnel (cf Gal 5, 19-26).
Saint Jean, cependant, n’hésite pas à dire que “le Verbe s’est fait chair” afin d’insister sur l’humanité véritable de Jésus, qui n’a pas fait semblant d’être homme : il est vraiment né, a vraiment eu faim et soif, a vraiment souffert, est vraiment mort. Et c’est bien en ce sens que le Credo emploie le mot de “chair” : il s’agit de la résurrection des morts, avec la totalité des personnes, pas seulement leurs âmes. Nous savons bien, en effet, que la distinction âme / corps est purement intellectuelle ; en pratique, l’âme est faite pour donner vie à un corps et le corps est indispensable à l’âme pour connaître le monde, les autres et soi-même (par les 5 sens). Les maladies psychosomatiques prouvent l’intime connexion entre les deux ; les neurosciences aussi, puisqu’elles ont démontré que la génétique (le code de nos cellules) peut être modifiée par l’épigénétique (notre environnement et notre comportement).
C’est donc le composé âme + corps qui est appelé par Jésus à ressusciter. Comme lui, d’ailleurs, qui s’est montré à ses disciples avec un corps portant les marques des clous et qui leur a permis de le toucher… Bien sûr, il y a une transformation, le corps ressuscité est devenu “glorieux”, “spirituel”, “incorruptible”, dit saint Paul, qui compare cette transformation à celle de la graine qui devient plante ; on pourrait aussi évoquer la chenille qui devient papillon. Alors les questions sur l’âge du corps ressuscité (mon corps de 20 ans ou de 80 ?) ou son état (je resterai handicapé ?) sont dépassées, tout au Ciel est renouvelé et perfectionné !
Dernière question : pourquoi se tracasser avec ça, pourquoi ne pas se contenter d’affirmer la vie éternelle ? Non seulement par fidélité à l’Évangile mais aussi parce qu’il en va de l’affirmation de la dignité du corps : faisant vraiment partie de moi, mon corps a droit au respect, de ma part et de celle des autres. Il n’est pas un genre de vêtement, comme disait Platon, comme le sous-entend aussi la croyance en la réincarnation où l’âme change de corps sans problème. Cela renforce également la charité : nous ne sommes pas simplement chargés de sauver les âmes des pécheurs mais aussi de prendre soin de leur corps…
Père Nicolas